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Fenêtres sur le passé
1893
Expérience d'assainissement à Brest

Source : La Dépêche de Brest 28 novembre 1893
On sait que, depuis les premiers jours du mois de septembre, l'administration municipale de Brest
s'est mise en relations avec le maire de la ville du Havre, où des expériences de désinfection des eaux ménagères
et des cabinets d'aisance par le système Hermitte sont en cours depuis le mois d'août.
À Lorient, les mêmes expériences ont été récemment faites ;
elles vont être entreprises dans notre ville dans une quinzaine de jours.
Nous avons dit que M. le docteur Anner, adjoint au maire, s'était récemment rendu à Lorient pour examiner
les résultats obtenus dans cette ville ;
à la suite de ce voyage, M. Sanquer, premier adjoint, s'adressant directement à l'inventeur, M. Hermitte,
lui demanda de vouloir bien venir à Brest pour s'entendre avec l'administration en vue de l'organisation immédiate,
à Brest même, des expériences déjà faites au Havre et à Lorient.

Désinfection de rue en 1910
M. Hermitte est arrivé à Brest hier matin et, après une première entrevue avec MM. Sanquer et Anner, il a pris rendez-vous
avec les deux adjoints pour se transporter au port de commerce
et étudier ensemble sur place les moyens pratiques de commencer immédiatement les essais.
Cette étude a été faite dans l'après-midi.
Accompagnés de l'architecte de la ville, MM.Sanquer, Anner
et Hermitte ont choisi, comme emplacement de l'usine provisoire, un hangar appartenant à M. Banchereau, situé sur la jetée de l'Ouest, près des ateliers de M. Le Tellier ;
c'est là que vont être installées la machine à vapeur
et la machine spéciale dite à électrolysation.
Nous avons déjà parlé de ce procédé, qui consiste à faire passer un courant électrique,
au moyen d'une machine spéciale, à travers l'eau de mer.
Sous l'influence de ce courant, l'eau de mer subit une décomposition particulière et donne un produit liquide
qui aurait la merveilleuse propriété, non seulement de désodorer entièrement les matières fécales et aussi les produits des eaux ménagères, mais encore de les désinfecter, et par ce mot il faut entendre la désinfection absolue,
c'est-à-dire la destruction des germes et principes morbifiques.
Le résultat de cette décomposition est un produit ressemblant à une eau légèrement blanchâtre,
à odeur légèrement chlorée, qu'on laisse librement couler au ruisseau et à l'égout.
Dans les expériences qui vont être entreprises à Brest,
l'eau électrolysée sortant de la machine sera conduite au poste
de police-octroi situé sur le premier bassin.
Ce local a été choisi pour trois raisons :
il y existe des cabinets publics ;
à l'étage se trouvent deux ménages où seront désinfectées
par le procédé les eaux ménagères ;
c'est enfin un endroit public où tout le monde pourra voir
ce qui se passe.
Le produit sortant des éviers et des cabinets sera directement jeté
à la rue, sur le ruisseau, et de là dans l'égout,
Les expériences commenceront dans une quinzaine de jours
et dureront un mois, l'eau de la mer sera prise dans la rade,
non loin de l'endroit où se trouve actuellement échoué le Celte.

Profitant de la présence de M. Hermitte et se préoccupant de la question de l'installation ultérieure et définitive
du système, l'administration a étudié, de concert avec MM. Hermitte et Guennoc, le choix possible des emplacements
les plus favorables pour l'installation de l'usine définitive et du ou des réservoirs où sera accumulé
le liquide désinfectant.
MM. Sanquer, Anner, Guennoc et Hermitte ont parcouru tout le port de commerce jusqu'à l'usine à gaz,
puis ils ont suivi la route longeant le mur de ce dernier établissement établissement remonter pat la rue Inkermann
et arriver au Petit-Paris ;
ce serait là le trajet de la canalisation qui conduirait l'eau de mer électrolysée, venant de l'usine, jusqu'au réservoir d'où, par une canalisation, le liquide désinfectant serait projeté en ville par des conduits avec branchements
et sous-branchements pour être amené dans toutes les rues, les égouts et dans toutes les maisons de Brest, Recouvrance, Annexion, port de commerce.
À moitié route serait placé un premier réservoir, peut-être nécessaire en raison de la différence d'altitude entre
le port de commerce et le Petit-Paris, qui est à 95 mètres au-dessus du niveau de la mer.
Tout ceci, bien entendu, est à l'état de projet et va être l'objet d'études sérieuses, approfondies, s'appuyant sur des devis étudiés, qui seront présentés par M. Hermitte ;
les administrations compétentes seront appelées à donner
leurs idées pratiques, les hommes spéciaux seront consultés ;
en un mot, l'administration municipale s'entourera
des renseignements les plus complets, de façon à présenter
au conseil municipal un projet bien défini,
avec devis et prix de dépenses.
En attendant et pendant que se feront ces études,
les essais vont être faits, au port de commerce,

ainsi que nous venons de l'expliquer ;
la population tout entière pourra, de visu, se rendre compte de l'expérience.
La ville de Brest va entreprendre là une très grosse affaire ;
c'est une révolution dans le système hygiénique.
Désormais, plus besoin de ces égouts, rues souterraines, où s'accumulent les immondices de toute une ville
et avec eux les dangers de l'infection permanente ;
plus besoin de se préoccuper de grandes chasses d'eau dans lesdits égouts, qui, désormais, ne recevront plus
de matières infectes, le liquide provenant des éviers et cabinets d'aisance qui les traversera étant lui-même
désinfecté à la source ;
plus de fosses dans les maisons, plus de ces marais stagnants dans nos cours ;
chaque propriétaire aura intérêt, moyennant une rétribution minime, à doter chaque étage, chaque cabinet,
d'un réservoir d'eau électrolysée, amenée par un branchement pris sur la conduite de la rue ;
ce sera le système analogue à celui du gaz ou de l'eau élevé à chaque étage ;
enfin, suppression des fosses d'aisance, puisqu'il n'y aura plus de fosse.
C'est, en un mot, la suppression de la cause même de l'infection.
Tout cela se réalisera-t-il ?
Nous le souhaitons ardemment.
Quoi qu'il arrive, l'administration municipale aura bien mérité de la population, et Brest aura eu l'honneur
d'être une des premières villes de France à avoir fait l'expérience.
Cela coûtera de l'argent, sans nul doute ;
mais nous avons confiance en notre conseil municipal et nous sommes convaincu que, saisi d'un projet bien étudié, bien mûri sous toutes ses faces, tant au point de vue sanitaire que financier,
il saura prendre la décision qu'il convient.