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Fenêtres sur le passé
1937
L'or du Douric est repéré
Source : La Dépêche de Brest 5 janvier 1935
À la suite de l'article paru dans la Dépêche du 27 décembre (*), sur la disparition des vieilles maisons du Douric, dont la construction remontait à 1770, maisons dans lesquelles un des administrateurs du Finistère, avant d'être guillotiné, place du Château, en 1793, était venu chercher refuge ; nous avons reçu la lettre suivante :
J'ai lu avec une grande attention l'article concernant la construction d'un nouveau quartier au Douric et la démolition de vieilles maisons près desquelles un trésor aurait été caché en 1793.
Je m'occupe, depuis plusieurs années, de radiesthésie.
J'ai pris immédiatement mon pendule, l'ai promené sur les photos publiées sur votre journal et, à ma grande satisfaction, mon pendule a tourné sur les radiations de l'or.
J'ai tracé sur un papier le plan des ruines représentées sur vos photos.
J'ai retrouvé les mêmes girations.
Pas de doute, le trésor existe puisque l'or a parlé sur mon plan et les photos.
Il n'y a plus qu'à se rendre sur le terrain pour repérer exactement l'endroit où il est enfoui.
Veuillez agréer etc…
(*) Article du 27 décembre à lire sur Retro29
Nous prîmes rendez-vous avec le radiesthésiste, que nous appellerons Dubois pour respecter l'anonymat qu'il désire conserver.
On ne peut mettre en doute cette science nouvelle.
Nous avons tous vu des sourciers découvrir avec leurs baguettes des eaux souterraines insoupçonnées et, dans le cours de T. S. F. que faisait, pendant la guerre, aux élèves-officiers d'artillerie, M. Turenne, ingénieur de l'École centrale, il professait que « tous les corps émettaient des ondes qui cheminent sur d'autres ondes.
Le son, la lumière, les corps radio-actifs, le corps humain, tout, disait-il, émet et reçoit des ondes ».
« L'instrument qui pourra se mettre en résonance avec ces ondes pour les détecter complétera les cinq sens actuels par un véritable sixième sens », concluait-il.
Que, sur le terrain, baguettisants ou pendulisants découvrent dans le sol de l'eau ou le métal enfoui, nul ne le conteste, mais M. Dubois prétendait avoir réussi à faire « parler l'or » en promenant son pendule sur une reproduction photographique.
L'expérience était curieuse.
Il voulut bien la reproduire avec succès devant nous.
M. Dubois est un homme paisible et charmant qui exerce la profession d’électricien à l’arsenal et possède à Saint-Pierre-Quilbignon un vaste jardin.
Petit, grisonnant, il frise la cinquantaine et s'est adonné avec passion à la radiesthésie, science qu'il a étudiée, dont il ne cherche pas à pénétrer les secrets, mais qu'il utilise avec une manifeste conviction après en avoir obtenu de curieux résultats.
— Comme vous, dit-il, je regardais avec un certain scepticisme les gens promenant une baguette dans un champ pour faire jaillir de l'eau, à la manière de Moïse, qui fut peut-être le premier radiesthésiste.
« Avec les membres de la Société d'horticulture, j'allai un jour visiter le jardin colonial de l’île de Batz.
Son directeur fit devant nous des expériences si concluantes par les résultats obtenus que le lendemain je m’essayai à l’imiter avec une branche fourchue de noisetier.
Malgré tous mes efforts pour l’en empêcher, ma baguette se renversa et se tordit lorsque j’approchai de l’eau.
« Prodigieusement intéressé, je poursuivi mes expériences.
J’avais acheté des ouvrages traitant de radiesthésie, assisté à une conférence faite à Brest par l'abbé Mermet.
Bref, devenu un fervent adepte de cette science nouvelle, j'obtins des résultats qui me surprirent moi-même. »
— Vous étiez doué
— Mais non, tout le monde peut devenir radiesthésiste.
Soixante hommes sur cent sont aptes à devenir d’excellents sourciers.
Les femmes sont encore mieux prédisposées, surtout pour la recherche de l'eau, à cause de leur magnétisme négatif.
« Le plus difficile est de pouvoir se mettre rapidement à la longueur d'onde magnétique de tous les corps répandus dans la nature, chacun de ces corps ayant sa longueur d'onde propre.
Il faut aussi pouvoir se décharger rapidement des ondes pendulaires du corps que l’on vient d'étudier.
« On doit éviter de manger et de boire tout ce qui a un effet congestif.
Je ne bois ni vin, ni alcool, je ne fume pas, je ne mange jamais de viande, seulement des légumes et des fruits.
— Pas drôle ce régime !
— Accoutumance. Je m'en trouve bien. Je suis en parfaite santé.
« La radiesthésie, poursuivit-il, grâce au progrès des sciences électro-magnétiques commence à être prise au sérieux.
On sait que c'est un phénomène d’induction qui fait osciller les baguettes.
Le pendule donne exactement les mêmes indications.
C’est le même détecteur magnétique.
M. Dubois poursuit son cours.
Il sortit de sa poche son pendule : une petite toupie creuse en ébonite, suspendue à une chaînette de cuivre de 25 centimètres de longueur.
— Rien n’est plus simple que de découvrir une nappe d’eau souterraine.
— Je n’ai pas besoin de me servir de baguette ou de pendule pour savoir que nous n’en sommes pas ici éloignés.
M. Dubois fit quelques pas :
— Quand j'arriverai près du filon d'eau, dit-il, mon pendule oscillera ; au-dessus il tournera.
Quand je l'aurai franchi, les oscillations reprendront.
La profondeur à laquelle se trouve l'eau est égale à la distance entre les deux points où le pendule a commencé à osciller.
Le pendule se comporta comme l'opérateur l'avait dit.
— Pour savoir si l'eau est potable, continua M. Dubois, il me suffirait de prendre comme témoin, dans un récipient quelconque, de l'eau pure.
Si mon pendule tourne dans le sens des aiguilles d'une montre ,l'eau est potable.
S'il tourne en sens inverse, elle n'est pas utilisable pour la consommation.
M. Dubois prit une cuvette, l'emplit d'eau au robinet, présenta son pendule.
Il tourna de gauche à droite.
Il plongea ! ses mains dans l'eau qu'il souilla, recommença l'expérience les girations du pendule se firent de droite à gauche.
— Très bien, mais comment expliquez-vous votre découverte de l'emplacement du trésor du Douric en passant simplement votre pendule sur une photo ?
— Je ne l'explique pas, je constate.
Retirant son alliance en or, devant servir de témoin, il l'enferma dans la partie creuse de la toupie d'ébonite du pendule, le passa sur la photo que nous avons publiée.
Quand le pendule arriva au-dessus de la maison du Douric la plus éloignée de la rue Inkermann, il se mit à tourner.
— Voyez, dit avec assurance M. Dubois, le trésor se trouve derrière cette maison.
La bague fut remplacée par une pièce d'argent.
— Le trésor ne contient pas que de l'or. Il y a aussi de l'argent, affirma-t-il.
On se rendit sur le terrain.
Il pleuvait.
Sur le futur boulevard qui, de la rue de Verdun, doit rejoindre, rue Anatole France, la route de Gouesnou, il fallait patauger dans la terre rapportée, boueuse et gluante.
À une vingtaine de mètres en arrière de la maison indiquée, après quelques tâtonnements, le pendule, nanti de la bague en or, se mit à valser éperdument.
— Le trésor est enfoui par ici, décréta M. Dubois.
Sans se soucier de la pluie, de la boue, dans laquelle il enfonçait jusqu'aux chevilles, M. Dubois arpenta le terrain, vérifiant les données de son pendule et jalonna avec des branches l’endroit où d’après ses calculs devait se trouver le trésor.
— Il est certainement enfoui entre les branches de la croix que je viens de jalonner avec ces piquets, dit-il.
Mais aujourd’hui le temps est vraiment trop mauvais pour poursuivre les recherches.
Je reviendrai déterminer d’une façon précise l’endroit exact où le trésor est enfoui et sa profondeur.
Nous revînmes près des maisons en ruines.
M. Dubois fit quelques pas.
Le pendule resta immobile.
Le radiesthésiste étendit le bras gauche dans le sens opposé au terrain et piqueté par lui.
Le pendule ne bougea pas.
Lentement, il pivota sur lui-même, le bras gauche toujours tendu horizontalement.
Quand le bras montra la direction des baguettes fichées en terre, les girations du pendule reprirent et, au bout de sa chaîne, la toupie d’ébonite tourna comme une petite folle.
Une fois de plus l’or avait parlé …
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Source : La Dépêche de Brest 10 janvier 1935