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Chroniques d'un monde paysan à jamais disparu
Louis Conq de Tréouergat raconte ...
Source : "Les échos du vallon sourd" de Louis Conq - Brud Nevez
Remerciements à Lucien Conq
Pont-Prennig, charcutier
Accompagnons un peu Claude, le Pont-Prennig, comme sacrificateur …
Le cochon était saigné, la hure en bas, allongé sur une ridelle de charrette, maintenu haute sur une « barrière-jupe », celle-ci simplement appuyée à un mur de grange.
Le sang de l’animal était recueilli précieusement et remué immédiatement dans un bassin, en vue de faire du bon boudin additionné à beaucoup d’oignons.
Ensuite, on échaudait la peau pour déraciner facilement la soie avec d’immenses couteaux, ou une racleuse à soie faite tout bonnement d’un morceau de vieille faux bien aiguisé.
Après lui avoir fait comme il se doit la « barbe », le porc était crocheté par les tendons-muscles de ses pattes postérieures, la hure en bas, et on l’ouvrait.
On enlevait de quoi faire des andouilles magnifiques, du pâté de campagne et divers rôtis.
Enfin, il était fendu en deux, suivant la ligne dorsale, à la fendeuse, de quelques coups de maillet.
Quand la chair aura refroidi, on en fera des quartiers.
Et ceux-ci seront encore découpés pour être salés dans le charnier.
À moins qu’ils ne prennent le chemin des halles de Saint Renan, sauf ce que l’on aura retenu pour soi ou pour un autre foyer des environs.
Pont-Prennig avait des clients à Plouguin, Guipronvel, chez ses frères et sœurs, à Milizac même, et jusqu’à Saint Renan et Lanrivoaré qu’il parcourait sans arrêt, et pas seulement le samedi.
Ce jour-là, les charrettes à portage prenaient la route du marché des grains et farines de Saint Renan.
Le meunier prenait dans sa charrette le sac de Pierre, deux autres de Jacques, et il était chargé de les vendre aux halles, et d’en ramener à domicile, l’argent au propriétaire.
À moins que ce dernier ne soit lui-même dans la charrette du meunier, au milieu des quartiers de viande de porc à l’aller, au retour avec un couple de porcelets ou deux, dans leur sac, au fond la carriole.
Quand celle-ci était chargée plus que raison, ce qui survenait bien des fois, dans les montées des chemins, ainsi que dans les passages difficiles, nos passagers descendaient de la carriole pour soulager l’étalon limonier, ou plus souvent l’attelage de deux chevaux ; voire pousser dessus à certains endroits et les aider à traîner la charretée.
Au retour, le meunier ramassait encore d’autres gens sur la route, tandis qu’ils s’en revenaient à pied après avoir été vendre quelques bêtes.
C’étaient les « auto-stoppeurs » d’alors !
Et ils étaient souvent bavards, vous pouvez le croire !
À Lanrivoaré, arrêt quasi-obligatoire.
Il y avait des anneaux de fer par douzaines dans les murs, spécialement pour attacher les chevaux et leur donner parfois un picotin d’avoine.
Mais les hommes et aussi les femmes, allaient tous à la « chapelle-du-bouquet-de-lierre », l’hostellerie qui était annoncée par cette enseigne.
La conversation montait en degré avec le nombre des coups de « lagoutte » ou de rhum,
si ce n’était le café bien « coiffé d’un coup de fort ».
Il est aussi évident qu’un peu plus tôt, ou plus tard, il pouvait y avoir quelques « manchées » entre garçons « terribles », de vrais « tagnouz » à la langue irritante, tout aussi bien ou même mieux mise en valeur qu’à Marseille.