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Chroniques d'un monde paysan à jamais disparu
Louis Conq de Tréouergat raconte ...
Source : "Les échos du vallon sourd" de Louis Conq - Brud Nevez
Remerciements à Lucien Conq
Sortie des pensionnaires au Bouguen
Et « P’tit Jésus », cela ne vous dit rien ?
Non, bien sûr !
Quand nous allions en promenade, nous étions toujours accompagnés du « Père Floc’h »,
nous dirions Monsieur Le Page en français ou écuyer.
Il nous conduisait souvent au Bouguen, sur un plateau bordé de douves et de fortifications de Vauban.
Là, nous jouions au football.
Il n’y avait pas encore de terrain où nous aurions pu taper dans le ballon.
Ah bien ! C’est là que nous trouvions un vieux bonhomme
avec un chapeau tout luisant de crasse et sa petite baladeuse pleine
de paquets de cacahuètes, de bûchettes de bois de réglisse à mâcher
et de toutes sortes de bonbons.
Nous avions en prime des tas d’histoires en attendant le dernier sou
qui « brûlait » encore le fond de nos poches.
Il faisait de fort bonnes petites affaires avec nous,
ainsi qu’avec les garçons du Lycée.
Mais pas avec moi, cependant !
Avec mes seuls dix sous tous les quinze jours, quand je les avais !
Ils ne faisaient pas long feu.
Parfois, le vieux marchand donnait quand même quelque chose à ceux
qui n’avaient rien pour payer.
Et c’est bien, peut-être, pour cela que nous lui avions donné le surnom
de « P’tit Jésus ».
Souvent, le Père Floc’h avait bien du mal à rassembler sa troupe,
bien qu’il se mit à tempêter comme un beau diable.
Que de cachettes il y avait là-bas !
Parfois aussi, les gars de la Coloniale venaient manœuvrer et faire « la petite guerre ».
Ils tiraient à la mitrailleuse, couraient le fusil à la main et s’affalaient à plat ventre derrière les arbres.
D’autres soldats se trouvaient eux, en bas, dans les anciennes douves ou fossés larges comme des routes,
sautant par-dessus des trous profonds, ou se faisant la courte échelle par-dessus des pans de murs
ou d’énormes barrières-palissades.
Ainsi, pour ceux-là, c’était tous les jours « jeudi » au Bouguen !
À midi, leurs « pions » faisaient sonner le clairon, l’heure de la soupe, et ils ne se faisaient pas « tirer l’oreille ».